Cadran des Balkans
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Re: Cadran des Balkans
Encore un beau programme Stéphane !
Il permet de vulgariser cet astucieux cadran que je ne connaissais pas encore et qui montre, si c’était encore nécessaire, l’immense ingéniosité des anciens.
Comme d’habitude, j’ai rajouté le lien dans le message Les programmes GeoGebra de Stéphane
Il permet de vulgariser cet astucieux cadran que je ne connaissais pas encore et qui montre, si c’était encore nécessaire, l’immense ingéniosité des anciens.
Comme d’habitude, j’ai rajouté le lien dans le message Les programmes GeoGebra de Stéphane
Yvon Massé - Site perso. : La gnomonique
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Re: Cadran des Balkans
J’ai eu l’occasion de me pencher récemment sur cette merveille d’ingéniosité et je vous propose d’expliquer son fonctionnement par la géométrie, ce qui permettra de bien visualiser l’approximation effectuée et, peut-être, de se donner une idée sur la façon dont on a pu imaginer ce cadran, en effet les outils que nous utiliserons sont ceux que maîtrisaient parfaitement ses concepteurs.
Dans cette première contribution, je donnerai d’abord quelques éléments afin de bien situer ce cadran pour lequel on trouve de nombreux écrits mais qui, malheureusement, peuvent apporter une grande confusion.
Le cadran des Balkans fait partie d’une famille dont une bonne dizaine d’exemplaires ont été retrouvés et dont on situe la fabrication entre le Ier et le VIe s. apr. J.-C. Le premier a été découverts entre 1730 et 1740 près de Rome et le second une centaine d’années plus tard en France, dans le département de la Loire à Crêt-Chatelard. Tous les deux avaient le porte-ombre cassé et sont actuellement perdus. Les érudits qui ont décrit ces cadrans n’ont pas compris comment les utiliser (1). Ce n’est qu’en 1925, dans son livre Die Theorie der Sonnenuhren, que J. Drecker a proposé un mode d’utilisation cohérent qui utilise la totalité des inscriptions de l’instrument et qui permet de relever les heures inégales avec une approximation parfaitement acceptable. C’est le mode d’emploi qui est donné dans l’article de D. Savoie (2) mentionné par Stéphane et qui est utilisé dans son programme.
La majorité des exemplaires retrouvés ne sont pas complets. Parmi les rares qui le sont (au moins 2), il y a celui du Musée d’histoire des sciences d’Oxford (celui qui apparaît dans le programme de Stéphane) et dont on peut voir de magnifiques photos ici :
https://www.hsm.ox.ac.uk/collections-on ... rative-307
En voici une qui présente les différentes pièces démontées afin de mieux comprendre leurs fonctions.

A : platine principale avec, en haut, l’anneau de suspension et, sur la droite, l’échelle des latitudes de 30 à 60°.
B : plaque venant s’insérer dans la platine en plaçant son index, en haut à droite, en face de l’échelle des latitudes. Elle comporte deux échelles des signes symétriques.
C : porte ombre et sa clavette pour rassembler les pièces, à régler sur le signe du jour d’observation. Les graduations horaires sont gravées sur la surface incurvée.
Sur les photos suivantes, à gauche on peut voir la face arrière de la platine qui reçoit une liste de lieux avec la latitude correspondante. À droite, le cadran est remonté et prêt à être utilisé pour une latitude d’environ 46° à une date situé à une dizaine de jours avant l’équinoxe de printemps, ou après celui d’automne.

Sur l’illustration suivante (3), qui représente une reconstitution de l’exemplaire conservé au British Museum et qu’on peut admirer ici :
https://www.britishmuseum.org/collectio ... 997-0303-1
on peut voir un système de suspension différent mais le principe du cadran reste identique.

L’utilisation consiste à suspendre le cadran et à l’orienter de façon que l’ombre du gnomon s’aligne parfaitement avec la surface incurvée et à lire l’heure indiquée. Le réglage du cadran reste inchangé toute la journée, en effet il est toujours possible de faire porter l’ombre correctement en orientant le cadran, même si le Soleil est passé à l’ouest.
Ce mode d’utilisation est très spécifique et il est difficile de le rapprocher de celui d’un autre type de cadran solaire, ce qui explique peut-être le temps qu’il a fallu pour le retrouver. Son classement aussi ne tombe pas sous le sens : ce n’est pas un cadran d’angle horaire ni un cadran d’azimut, c’est donc un cadran de hauteur, ce qui apparaîtra plus clairement dans le message suivant.
Terminons enfin avec le nom que l’on peut lui donner. Au livre IX de son De Architectura, Vitruve énumère des cadrans en les associant à leur inventeur : le « pros pan klima » (littéralement « pour toutes les latitudes » en grec) est attribué à Theodosius et Andreas sans aucune autre précision. À la fin du XVIIIe siècle, Montucla est peut-être le premier à faire le rapprochement entre ce passage et le cadran trouvé près de Rome (4). Depuis, il s’avère que parmi tous les cadrans retrouvés datant de l’Antiquité, les seuls qui ont la possibilité de fonctionner pour différentes latitudes sont tous de ce modèle, de là à les dénommer « pros pan klima » il n’y a qu’un pas que beaucoup ont franchi, mais les historiens des sciences préfèrent rester sur la réserve et parle de « cadran portable romain universel ».
À bientôt pour aborder géométriquement les aspects techniques...
(1) ^ Baldani en 1741 et Durand/de la Noë en 1897. Voir respectivement :
https://books.google.fr/books?id=oMtNz-YSnkUC&pg=PA185
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k408247n/f5
(2) ^ D. Savoie a complété cet article pour en faire l’objet du chapitre II de son livre Recherches sur les cadrans solaire, Brépols, 2014. Une traduction en anglais de ce chapitre se retrouve dans une publication plus récente de D. Savoie, Three examples of ancient “universal” portable sundials, 2020, téléchargeable ici :
https://archive.nyu.edu/bitstream/2451/ ... Savoie.pdf
(3) ^ Crédit : Ackermann 2003 / Light on Byzantium: A Universal Sundial in the British Museum
(4) ^ Histoire des Mathématiques, tome 1, 1799 - Supplément contenant l’histoire de la gnomonique, p. 724
Dans cette première contribution, je donnerai d’abord quelques éléments afin de bien situer ce cadran pour lequel on trouve de nombreux écrits mais qui, malheureusement, peuvent apporter une grande confusion.
Le cadran des Balkans fait partie d’une famille dont une bonne dizaine d’exemplaires ont été retrouvés et dont on situe la fabrication entre le Ier et le VIe s. apr. J.-C. Le premier a été découverts entre 1730 et 1740 près de Rome et le second une centaine d’années plus tard en France, dans le département de la Loire à Crêt-Chatelard. Tous les deux avaient le porte-ombre cassé et sont actuellement perdus. Les érudits qui ont décrit ces cadrans n’ont pas compris comment les utiliser (1). Ce n’est qu’en 1925, dans son livre Die Theorie der Sonnenuhren, que J. Drecker a proposé un mode d’utilisation cohérent qui utilise la totalité des inscriptions de l’instrument et qui permet de relever les heures inégales avec une approximation parfaitement acceptable. C’est le mode d’emploi qui est donné dans l’article de D. Savoie (2) mentionné par Stéphane et qui est utilisé dans son programme.
La majorité des exemplaires retrouvés ne sont pas complets. Parmi les rares qui le sont (au moins 2), il y a celui du Musée d’histoire des sciences d’Oxford (celui qui apparaît dans le programme de Stéphane) et dont on peut voir de magnifiques photos ici :
https://www.hsm.ox.ac.uk/collections-on ... rative-307
En voici une qui présente les différentes pièces démontées afin de mieux comprendre leurs fonctions.

A : platine principale avec, en haut, l’anneau de suspension et, sur la droite, l’échelle des latitudes de 30 à 60°.
B : plaque venant s’insérer dans la platine en plaçant son index, en haut à droite, en face de l’échelle des latitudes. Elle comporte deux échelles des signes symétriques.
C : porte ombre et sa clavette pour rassembler les pièces, à régler sur le signe du jour d’observation. Les graduations horaires sont gravées sur la surface incurvée.
Sur les photos suivantes, à gauche on peut voir la face arrière de la platine qui reçoit une liste de lieux avec la latitude correspondante. À droite, le cadran est remonté et prêt à être utilisé pour une latitude d’environ 46° à une date situé à une dizaine de jours avant l’équinoxe de printemps, ou après celui d’automne.

Sur l’illustration suivante (3), qui représente une reconstitution de l’exemplaire conservé au British Museum et qu’on peut admirer ici :
https://www.britishmuseum.org/collectio ... 997-0303-1
on peut voir un système de suspension différent mais le principe du cadran reste identique.

L’utilisation consiste à suspendre le cadran et à l’orienter de façon que l’ombre du gnomon s’aligne parfaitement avec la surface incurvée et à lire l’heure indiquée. Le réglage du cadran reste inchangé toute la journée, en effet il est toujours possible de faire porter l’ombre correctement en orientant le cadran, même si le Soleil est passé à l’ouest.
Ce mode d’utilisation est très spécifique et il est difficile de le rapprocher de celui d’un autre type de cadran solaire, ce qui explique peut-être le temps qu’il a fallu pour le retrouver. Son classement aussi ne tombe pas sous le sens : ce n’est pas un cadran d’angle horaire ni un cadran d’azimut, c’est donc un cadran de hauteur, ce qui apparaîtra plus clairement dans le message suivant.
Terminons enfin avec le nom que l’on peut lui donner. Au livre IX de son De Architectura, Vitruve énumère des cadrans en les associant à leur inventeur : le « pros pan klima » (littéralement « pour toutes les latitudes » en grec) est attribué à Theodosius et Andreas sans aucune autre précision. À la fin du XVIIIe siècle, Montucla est peut-être le premier à faire le rapprochement entre ce passage et le cadran trouvé près de Rome (4). Depuis, il s’avère que parmi tous les cadrans retrouvés datant de l’Antiquité, les seuls qui ont la possibilité de fonctionner pour différentes latitudes sont tous de ce modèle, de là à les dénommer « pros pan klima » il n’y a qu’un pas que beaucoup ont franchi, mais les historiens des sciences préfèrent rester sur la réserve et parle de « cadran portable romain universel ».
À bientôt pour aborder géométriquement les aspects techniques...
(1) ^ Baldani en 1741 et Durand/de la Noë en 1897. Voir respectivement :
https://books.google.fr/books?id=oMtNz-YSnkUC&pg=PA185
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k408247n/f5
(2) ^ D. Savoie a complété cet article pour en faire l’objet du chapitre II de son livre Recherches sur les cadrans solaire, Brépols, 2014. Une traduction en anglais de ce chapitre se retrouve dans une publication plus récente de D. Savoie, Three examples of ancient “universal” portable sundials, 2020, téléchargeable ici :
https://archive.nyu.edu/bitstream/2451/ ... Savoie.pdf
(3) ^ Crédit : Ackermann 2003 / Light on Byzantium: A Universal Sundial in the British Museum
(4) ^ Histoire des Mathématiques, tome 1, 1799 - Supplément contenant l’histoire de la gnomonique, p. 724
Yvon Massé - Site perso. : La gnomonique
Re: Cadran des Balkans
Bonjour,
Merci pour ce partage très intéressant
Merci Stéphane pour cette remarquable animation très pédagogique et merci à Yvon pour ces rappels historiques.
Je m'étais également penché sur l'aspect théorique de ce cadran et certains points me paraissaient obscurs !
Du coup j'ai hâte de lire la démonstration géométrique d'Yvon.
A bientôt
SebB
Merci pour ce partage très intéressant
Merci Stéphane pour cette remarquable animation très pédagogique et merci à Yvon pour ces rappels historiques.
Je m'étais également penché sur l'aspect théorique de ce cadran et certains points me paraissaient obscurs !
Du coup j'ai hâte de lire la démonstration géométrique d'Yvon.

A bientôt
SebB