2 points d'ombre
Posté : dim. 7 juil. 2019 16:23
Les notions d’inclinaison et de déclinaison sont si présentes en gnomonique qu’on a l’impression qu’elles sont obligatoires, et bien disons le tout net : c’est faux ! Ces angles définissent la position du cadran dans le repère local qui a la particularité d’être facile à retrouver (verticale et direction du sud). Le repère local n’est toutefois qu’un repère intermédiaire et il n’est absolument pas indispensable. Les seules informations nécessaires pour établir un cadran solaire sont la direction de l’axe polaire et une seule ligne d’heure. Girard Desargues l’a montré de façon originale en 1640 (1) avec une procédure mi-pratique mi-géométrique et qui a aussi la particularité de ne pas tracer ni utiliser la sous-stylaire.
Quelques année plus tard, un certain Sieur R. A., probablement inspiré par Desargues, publia un opuscule de seulement 13 pages (2) dont le titre est particulièrement explicite : Manière de décrire un cadran des heures à la française sur toute sorte de superficie plane, sans savoir la hauteur du pôle du lieu, la déclinaison ou l’inclinaison du plan à l’aide seulement de deux points d’ombre pris au hasard, et sachant la déclinaison du point du zodiaque où se trouve le Soleil. Le tout le plus simplement qu’on saurait souhaiter.
Pour la première fois, semble-t-il, on envisageait d’utiliser 2 points d’ombre pour déterminer la position de l’axe polaire et, sans élément supplémentaire que la ligne de midi, réaliser entièrement le cadran le plus difficile à tracer, à savoir le cadran incliné déclinant. Bien que cette méthode ait eu peu de retentissement, on la retrouve toutefois mentionnée dans divers ouvrages de gnomonique jusqu’à une époque récente. Enfin, quand j’ai commencé à développer le logiciel Calcad, c’était dans le but de mettre en application cette méthode qui m’avait beaucoup impressionné par le peu de notion à mettre en œuvre.
Dans ce premier message, je vous propose de présenter la méthode du Sieur R. A. Ensuite je vous ferai un historique des publications proposant d’établir un cadran solaire avec 2 points d’ombre. Enfin, dans un troisième message, je vous exposerai la modernisation apportée par Calcad et les choix qui ont été retenus pour son utilisation.
Comme il est dit plus haut, le principe de la méthode du Sieur R. A. est, dans un premier temps, de placer le style suivant l’axe polaire. Pour cela, quand on a relevé les 2 points d’ombres C et D de l’extrémité A d’un gnomon outil AB (voir la figure I de la planche suivante, extraite de la brochure du Sieur R. A.) on reporte à part, sur une surface plane, les distances AC et AD sur une même ligne (figure II). On trace ensuite une droite KE passant par A et telle que l’angle entre ACD et AE corresponde au complément de la déclinaison du soleil au jour de l’observation, KE représente alors l’axe polaire avec E du côté sud. En donnant au point E une position quelconque, on mesure les distances EC et ED et on les reporte sur deux baguettes. On reporte ensuite la distance EA sur la verge qui servira de style (figure III). En assemblant les baguettes et le style sur le cadran de façon à faire correspondre les lettres repères, on retrouve ainsi la position du point E dans l’espace et par suite celle du style polaire EF (figure I).
Le style en place, on peut ensuite tracer facilement toutes les lignes du cadran :
Cette double solution apparaît clairement quand on envisage le problème au niveau de la sphère céleste (voir figure suivante). La connaissance des points C et D nous donne la position du Soleil \(S_C\) et \(S_D\) sur la sphère. La distance entre le pôle nord et le Soleil étant le complément de sa déclinaison \(d\), le pôle se trouve donc à l’intersection des 2 cercles de centre \(S_C\) et \(S_D\) et de rayon \(90°-d\). Les deux points d’intersection P et P’ sont les deux solutions possibles dont il convient alors de choisir la bonne à l’aide d’une indication complémentaire.
C’est ici que s’arrête la première partie de l’exposé. J’ai voulu être concis dans la présentation de cette méthode mais si certains points demandent des éclaircissements, n’hésitez pas à les demander.
1 ^ - À la fin d’un fascicule sur la coupe des pierres (pdf de 11,5 Mo) publié en 1640 à Paris, Girard Desargues rajouta, à titre d’illustration, un chapitre d’une vingtaine de lignes intitulé : Manière universelle de tracer au moyen du style placé, tous cadrans plats d’heures égales au Soleil, avec la règle, le compas, l’équerre et le plomb. Les conceptions de Desargues sur la gnomonique furent ensuite développées par Abraham Bosse en 1463 dans son livre La Manière universelle de M. Desargues, lyonnais, pour poser l’essieu et placer les heures. Dans cet ouvrage le principe de base pour déterminer l'axe polaire est l’utilisation de 3 points d’ombre, autre approche qui ne sera pas présentée ici.
2 ^ - Sieur R.A. Manière de décrire un cadran des heures à la française (pdf de 0,7 Mo), 1644 à Paris.
Quelques année plus tard, un certain Sieur R. A., probablement inspiré par Desargues, publia un opuscule de seulement 13 pages (2) dont le titre est particulièrement explicite : Manière de décrire un cadran des heures à la française sur toute sorte de superficie plane, sans savoir la hauteur du pôle du lieu, la déclinaison ou l’inclinaison du plan à l’aide seulement de deux points d’ombre pris au hasard, et sachant la déclinaison du point du zodiaque où se trouve le Soleil. Le tout le plus simplement qu’on saurait souhaiter.
Pour la première fois, semble-t-il, on envisageait d’utiliser 2 points d’ombre pour déterminer la position de l’axe polaire et, sans élément supplémentaire que la ligne de midi, réaliser entièrement le cadran le plus difficile à tracer, à savoir le cadran incliné déclinant. Bien que cette méthode ait eu peu de retentissement, on la retrouve toutefois mentionnée dans divers ouvrages de gnomonique jusqu’à une époque récente. Enfin, quand j’ai commencé à développer le logiciel Calcad, c’était dans le but de mettre en application cette méthode qui m’avait beaucoup impressionné par le peu de notion à mettre en œuvre.
Dans ce premier message, je vous propose de présenter la méthode du Sieur R. A. Ensuite je vous ferai un historique des publications proposant d’établir un cadran solaire avec 2 points d’ombre. Enfin, dans un troisième message, je vous exposerai la modernisation apportée par Calcad et les choix qui ont été retenus pour son utilisation.
Comme il est dit plus haut, le principe de la méthode du Sieur R. A. est, dans un premier temps, de placer le style suivant l’axe polaire. Pour cela, quand on a relevé les 2 points d’ombres C et D de l’extrémité A d’un gnomon outil AB (voir la figure I de la planche suivante, extraite de la brochure du Sieur R. A.) on reporte à part, sur une surface plane, les distances AC et AD sur une même ligne (figure II). On trace ensuite une droite KE passant par A et telle que l’angle entre ACD et AE corresponde au complément de la déclinaison du soleil au jour de l’observation, KE représente alors l’axe polaire avec E du côté sud. En donnant au point E une position quelconque, on mesure les distances EC et ED et on les reporte sur deux baguettes. On reporte ensuite la distance EA sur la verge qui servira de style (figure III). En assemblant les baguettes et le style sur le cadran de façon à faire correspondre les lettres repères, on retrouve ainsi la position du point E dans l’espace et par suite celle du style polaire EF (figure I).
Le style en place, on peut ensuite tracer facilement toutes les lignes du cadran :
- la sous-stylaire FG s’obtient en reportant, à l’aide d’une équerre par exemple, le style perpendiculairement sur le plan du cadran
- l’équinoxiale HP est la perpendiculaire à la sous-stylaire en en point M qui peut être quelconque
- on obtient le centre N du cadran équatorial auxiliaire rabattu sur le plan du cadran. en reportant sur la sous-stylaire à partir de M la distance entre ce point et le style. La distance doit être mesurée perpendiculairement au style
- la ligne de midi vrai est située à l’intersection du plan méridien avec celui du cadran. Comme le plan méridien est vertical et contient le style, un simple fil à plomb permet donc d’obtenir un ou plusieurs points de la ligne de midi comme indiqué à la figure IIII
- les lignes horaires se tracent en divisant le cadran équatorial auxiliaire et, des points d’intersection avec l’équinoxiale, en tirant les lignes horaires vers le centre F
Cette double solution apparaît clairement quand on envisage le problème au niveau de la sphère céleste (voir figure suivante). La connaissance des points C et D nous donne la position du Soleil \(S_C\) et \(S_D\) sur la sphère. La distance entre le pôle nord et le Soleil étant le complément de sa déclinaison \(d\), le pôle se trouve donc à l’intersection des 2 cercles de centre \(S_C\) et \(S_D\) et de rayon \(90°-d\). Les deux points d’intersection P et P’ sont les deux solutions possibles dont il convient alors de choisir la bonne à l’aide d’une indication complémentaire.
C’est ici que s’arrête la première partie de l’exposé. J’ai voulu être concis dans la présentation de cette méthode mais si certains points demandent des éclaircissements, n’hésitez pas à les demander.
1 ^ - À la fin d’un fascicule sur la coupe des pierres (pdf de 11,5 Mo) publié en 1640 à Paris, Girard Desargues rajouta, à titre d’illustration, un chapitre d’une vingtaine de lignes intitulé : Manière universelle de tracer au moyen du style placé, tous cadrans plats d’heures égales au Soleil, avec la règle, le compas, l’équerre et le plomb. Les conceptions de Desargues sur la gnomonique furent ensuite développées par Abraham Bosse en 1463 dans son livre La Manière universelle de M. Desargues, lyonnais, pour poser l’essieu et placer les heures. Dans cet ouvrage le principe de base pour déterminer l'axe polaire est l’utilisation de 3 points d’ombre, autre approche qui ne sera pas présentée ici.
2 ^ - Sieur R.A. Manière de décrire un cadran des heures à la française (pdf de 0,7 Mo), 1644 à Paris.